Jusqu’à ces jours
je savais les mots
à ne pas penser
à ne pas hurler
mais il m’apparut
qu’eux aussi étaient des nôtres
qu’il fallait donc les convier
je pense et hurle désormais
de l’intérieur
la douleur
l’absence
la peur
les regrets
je les invite parmi nous
je marche avec eux
ils m’apparaissent soudain
moins effrayants
que les ombres qu’ils dessinaient
alors que je les esquivais encore
Peut-être se vêt-on de nos douleurs
pour mieux s’en défaire
il faut savoir accepter la cape du chagrin
et sa capuche
qui jette un temps
une ombre au regard
Après le chemin
le vent soufflera
il soulèvera l’obscurité de mon visage
restera alors le souvenir de cette chaleur sur ma tête
comme celui du souvenir
de l’absent
du perdu
Certains jours
j’habite une de mes blessures
m’enfonce en elle
manque de m’y noyer
je ne sais pas encore bien
refermer la porte derrière moi
je dois alors sculpter ma plaie
la respirer
apprendre à vivre avec elle
pour savoir aussi
le moment venu
la refermer
tirer le rideau
enclencher la serrure
entre elle et moi
certains jours
j’habite une de mes blessures
et parfois j’en déménage
J’escalade ma douleur
pour en faire le tour
l’apercevoir de tout là-haut
et pouvoir enfin dire
je surplombe le chagrin
je l’ai gravi.