Jeanne Benameur, L’exil n’a pas d’ombre

Est-ce qu’on devrait apprendre les mots dès que le souffle nous vient sur terre juste pour pouvoir nommer les choses minuscules qui se perdent ? Est-ce qu’on pourrait les retenir ?

Comment rejoint-on l’absence ?

L’enfance n’est pas une terre que l’on quitte.

L’enfance est au fond de la poitrine.

Elle colle son front aux barreaux de la chambre.

Lui, il savait caresser chaque pierre du village. Sa main, il la laissait aller sur les murs quand il marchait, sur les écorces des arbres. Au soir il savait que sa main contenait la mémoire de chaque chose.

Le livre a ouvert en moi des portes immenses.

Plus rien ne peut les refermer.

Plus rien.

Ils l’ont déchiré

mais les portes battent

à l’intérieur de moi.

Rien ne peut refermer

ce qui a été ouvert.